Ne te figure pas, ma belle, <br />Que les bois soient pleins d'innocents. <br />La feuille s'émeut comme l'aile <br />Dans les noirs taillis frémissants ; <br /> <br />L'innocence que tu supposes <br />Aux chers petits oiseaux bénis <br />N'empêche pas les douces choses <br />Que Dieu veut et que font les nids. <br /> <br />Les imiter serait mon rêve ; <br />Je baise en songe ton bras blanc ; <br />Commence ! dit l'Aurore. - Achève ! <br />Dit l'étoile. Et je suis tremblant. <br /> <br />Toutes les mauvaises pensées, <br />Les oiseaux les ont, je les ai, <br />Et par les forêts insensées <br />Notre coeur n'est point apaisé. <br /> <br />Quand je dis mauvaises pensées <br />Tu souris... - L'ombre est pleine d'yeux, <br />Vois, les fleurs semblent caressées <br />Par quelqu'un dans les bois joyeux. - <br /> <br />Viens ! l'heure passe. Aimons-nous vite ! <br />Ton coeur, à qui l'amour fait peur, <br />Ne sait s'il cherche ou s'il évite <br />Ce démon dupe, ange trompeur. <br /> <br />En attendant, viens au bois sombre. <br />Soit. N'accorde aucune faveur. <br />Derrière toi, marchant dans l'ombre, <br />Le poëte sera rêveur ; <br /> <br />Et le faune, qui se dérobe, <br />Regardera du fond des eaux <br />Quand tu relèveras ta robe <br />Pour enjamber les clairs ruisseaux.<br /><br />Victor Marie Hugo<br /><br />http://www.poemhunter.com/poem/danger-d-aller-dans-les-bois/
