La nymphe l'aperçoit, et l'arrête, et soupire. <br />Vers un banc de gazon, tremblante, elle l'attire; <br />Elle s'assied. Il vient, timide avec candeur, <br />Ému d'un peu d'orgueil, de joie et de pudeur. <br />Les deux mains de la nymphe errent à l'aventure. <br />L'une, sur son front blanc, va de sa chevelure <br />Former les blonds anneaux. L'autre de son menton <br />Caresse lentement le mol et doux coton. <br /> <br />'Approche, bel enfant, approche, lui dit-elle, <br />Toi si jeune et si beau, près de moi jeune et belle. <br />Viens, ô mon bel ami, viens, assieds-toi sur moi. <br />Dis, quel âge, mon fils, s'est écoulé pour toi? <br />Aux combats du gymnase as-tu quelque victoire? <br />Aujourd'hui, m'a-t-on dit, tes compagnons de gloire, <br />Trop heureux, te pressaient entre leurs bras glissants, <br />Et l'olive a coulé sur tes membres luisants. <br />Tu baisses tes yeux noirs? Bienheureuse la mère <br />Qui t'a formé si beau, qui t'a nourri pour plaire! <br />Tu souris? tu rougis? Que ta joue est brillante! <br />Que ta bouche est vermeille et ta peau transparente! <br />N'es-tu pas Hyacinthe au blond Phoebus si cher? <br />Ou ce jeune Troyen ami de Jupiter? <br />Ou celui qui, naissant pour plus d'une immortelle, <br />Entr'ouvrit de Myrrha l'écorce maternelle? <br />Ami, qui que tu sois, oh! tes jeux sont charmants: <br />Bel enfant, aime-moi. Mon coeur de mille amants <br />Rejeta mille fois la poursuite enflammée; <br />Mais toi seul, aime-moi, j'ai besoin d'être aimée...'<br /><br />Andre Marie de Chenier<br /><br />http://www.poemhunter.com/poem/la-nymphe-l-apercoit/