Un chef d'oeuvre de la chanson française avec un texte très fort<br />Extrait de son album de 1963, Il aborde le sujet des déportations, sujet qui le touchait beaucoup puisque d'origine juive, il a été blessé dans son enfance par la déportation de son propre père<br /><br />Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers<br />Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés<br />Qui déchiraient la nuit de leurs ongles battants<br />Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent<br /><br />Ils se croyaient des hommes, n'étaient plus que des nombres<br />Depuis longtemps leurs dés avaient été jetés<br />Dès que la main retombe il ne reste qu'une ombre<br />Ils ne devaient jamais plus revoir un été<br /><br />La fuite monotone et sans hâte du temps<br />Survivre encore un jour, une heure, obstinément<br />Combien de tours de roues, d'arrêts et de départs<br />Qui n'en finissent pas de distiller l'espoir<br /><br />Ils s'appelaient Jean-Pierre, Natacha ou Samuel<br />Certains priaient Jésus, Jéhovah ou Vichnou<br />D'autres ne priaient pas, mais qu'importe le ciel<br />Ils voulaient simplement ne plus vivre à genoux<br /><br />Ils n'arrivaient pas tous à la fin du voyage<br />Ceux qui sont revenus peuvent-ils être heureux<br />Ils essaient d'oublier, étonnés qu'à leur âge<br />Les veines de leurs bras soient devenues si bleues<br /><br />Les Allemands guettaient du haut des miradors<br />La lune se taisait comme vous vous taisiez<br />En regardant au loin, en regardant dehors<br />Votre chair était tendre à leurs chiens policiers<br /><br />On me dit à présent que ces mots n'ont plus cours<br />Qu'il vaut mieux ne chanter que des chansons d'amour<br />Que le sang sèche vite en entrant dans l'histoire<br />Et qu'il ne sert à rien de prendre une guitare<br /><br />Mais qui donc est de taille à pouvoir m'arrêter ?<br />L'ombre s'est faite humaine, aujourd'hui c'est l'été<br />Je twisterais les mots s'il fallait les twister<br />Pour qu'un jour les enfants sachent qui vous étiez<br /><br />Vous étiez vingt et cent, vous étiez des milliers<br />Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés<br />Qui déchiriez la nuit de vos ongles battants
