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Medine - Boulevard Auriol

2006-11-19 5 Dailymotion

Sénégal 1978, le départ de mon pays ressemble plus à ma fuite <br />J'ai entrevu la réussite et son manteau tricolore <br />Pris refuge au près de l'ex-colonisateur <br />Homme de couleur qui un jour quitta l'Afrique <br />Quitta l'hémisphère sud et le Cancer des Tropiques <br />En direction des cités d'or <br />Mis le cap sur le Nord <br />Sans ma famille mais l'issue de son sort <br />Paris la capitale Française, <br />J'atterri sur la plus belle ville du monde entre deux chaises <br />Entre les boulots et l'entassement des foyers <br />Entre l'argent familial et le règlement du loyer <br />Si mes calculs restent bons, jusqu'en août <br />J’arriverais à m'en sortir <br />Mais en marchant sur une poutre <br />Bientôt j'aurais de quoi les faire venir <br />Mon épouse mon fils et ma fille pour changer d'avenir <br />Plus d'un millier de journées ont passées <br />Je retrouve le visage de ma famille soulagé <br />Apres leur vol avec escale sur le territoire d'Espagne <br />Le temps d'un contrôle de réparer les pannes <br />En panne de coeur en mal du pays <br />Mon fils et ma fille pleurent leurs amis chaque soir dans leur lit <br />Dans quelques mètres carrés fermés de contre-plaqué <br />Pour que le froid hivernal se trouve contre carré <br />Ménagère dans les hôtels est mon épouse <br />La peinture en bâtiment sera ma seconde épouse <br />Avant qu'elle me foute à la porte un joli soir de printemps <br />Et qu'elle me dise débrouille toi maintenant <br />Entre temps quelques nouvelles frimousses apparaissent <br />Un deuxième fils une deuxième fille, une double caresse <br />Et comme les bonnes nouvelles n'arrivent jamais seules <br />Je me retrouve sans un toit avec mes valises sur le sol <br />Retour au point de départ <br />Sur les quais de la gare <br />Habitations faites de toiles <br />Ce sont des tentes pour dortoir <br />Des couvertures dans la boue pour Marabout <br />Une corde entre deux trous pour faire sécher les boubous <br />France terre d'accueil, loin de mon village <br />Je ressens la ségrégation dans les plis de leurs visages <br />Apparemment les droits de l'homme ne marche pas pour les hommes noirs <br />Ne marchent pas pour les femmes noires <br />Mais l'exception de la règle un jour descendit de son bus <br />Sur son t-shirt était écrit Emmaüs <br />Appartement provisoire trouvé par les gens du livre <br />Vincent Auriol c'est le nom qui nous délivre <br />Un boulevard du 13ème arrondissement de Paris <br />Provisoirement j'y habiterai en plus le quartier est paisible <br />La charpente a l'air solide mais le bois est sec <br />Un incendie n'en ferait qu'une bouchée de pain sec <br />Sans attendre j'emménage avec ma femme de ménage <br />Avec mes problèmes d'argent et mes enfants en bas âge <br />J'envisage de rester peu de temps ici <br />Alors j'entreprends des démarches à la mairie de Paris <br />Simple précaution j'épluche les annonces <br />Mais derrière chaque demande se cache la même réponse : <br />"On vous rappellera, l'appart est déjà loué" <br />Même si parfois j'avais d’avance de quoi payer 3 loyers <br />15 ans pour comprendre le système <br />15 ans de lettres mortes envoyés au ministère <br />Trop étroit est devenu ce double F3 <br />Et s'en est trop car les petits se sont fait mordre par les rats <br />Insalubrité au rendez vous des crasseux <br />Suffisant pour mon espèce, pour les gens de ma race <br />Voici la France des odeurs qui ressurgit <br />Le tas de poussière qu'on a glissé sous un tapis <br />Dernière couche de peinture au plomb, c'est là leur socialisme <br />Mais ce sont nos enfants qui souffrent de saturnisme <br />Et je repense à ma venue de Dakar <br />Le rêve européen s'est transformé en cauchemar <br /><br />--Extrait du journal télévisé de France 2" (les enfants que l'on entend ici sont morts dans cet incendie, paix à leur âme) <br />"Mais depuis quelque semaines, elle craque, son fils de 6ans aurait été mordu par un rat en pleine nuit" <br /><br />-(le petit parle) Il était monté ici, après il est venu par ici, après il a sauté et après il m'a mordu.. <br /><br />"Mais aujourd'hui les habitants craignent pour leur sécurité et redoutent un incendie" <br /><br />--fin de l'extrait -- <br /><br />Voici l'heure d'un repos bien mérité <br />Apres une dure journée de labeur je m'assois devant la télé <br />"¨PAPA !! PAPA !!" -Mais qu'est qui a encore, vous devriez déjà être couché n'avez vous pas vu l'heure ? <br />Je me dirige vers la porte qui mène à l'autre appartement <br />Qui sert de salle de jeu et de chambre pour enfants <br />Une fumée noire qui s'infiltre sous la porte <br />Un hurlement de femme, qu'a t-elle a crier de la sorte ? <br />Ce sont des flammes, des flammes grandes comme les montagnes <br />Qui embrasent le corridor, les escaliers avec hargne <br />Un monstre de feu qui avale tout sur son passage <br />Qui détruit les fondations étage par étage <br />C'est une boite d'allumette enflammée de 6 étages <br />Une prison de feu qui entreprend son carnage <br />Aucune issue et ce depuis des années <br />Aucun extincteur ni détecteur de fumée <br />Et soudain je me souviens la raison pour laquelle je me suis levé du fauteuil <br />Pour les enfants et leurs querelles <br />Désormais séparés par l'incendie <br />Je cherche le regard d'un de mes fils d'un de mes filles <br />Ne bougez pas j'appelle les combattants du feu <br />Car papa n'est pas assez fort pour sauter dans le feu <br />Sauter dans le brasier d'un immeuble insalubre <br />Autant fermer les yeux et prier fort pour son salut <br />10 minutes se sont passées, aucune sirène aucune aide <br />Les entrées sont scellées dirigez vous vers les fenêtres <br />A plat ventre comme les cafards nos collocataires <br />La position est bien connue, face contre terre <br />En une fraction de seconde c'est ma vie qui s'enfuit <br />Lorsque le plafond s'écroule sur le dos de ma famille <br />Voici mon cercueil, ma cité provisoire <br />Vincent Auriol c'est le nom de son boulevard <br /><br />15 ans, 17 personnes sacrifiées <br />14 enfants ont péri sur le bûché <br />Bien souvent l'atrocité de la mort fait bouger les choses <br />Car désormais ils seront logés sur les roses <br />Dernière insulte par le chef commissaire : <br />"Tous ces noirs sont-ils en situation régulière ?" <br />Voici le prix du sang d'une ancienne colonie <br />Voici le respect attribué aux familles <br />.. <br />Voici le respect attribué aux familles <br /><br />Jammeh, Gassama, Cissé, Konaté, Diarra, Sy, Traoré, Sissokho, Dembélé <br />Et les familles de l'hôtel Opéra <br />Paix...Paix...

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