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Nicolas Boileau - L'art poétique - Chant I

2013-02-16 14 Dailymotion

Enfin MALHERBE vint, et, le premier en France, <br />Fit sentir dans les vers une juste cadence, <br />D’un mot mis en sa place enseigna le pouvoir, <br />Et réduisit la Muse aux règles du devoir. <br />Par ce sage écrivain la langue réparée <br />N’offrit plus rien de rude à l’oreille épurée. <br />Les stances avec grâce apprirent à tomber, <br />Et le vers sur le vers n’osa plus enjamber. <br />Tout reconnut ses lois ; et ce guide fidèle <br />Aux auteurs de ce temps sert encor de modèle. <br />Marchez donc sur ses pas; aimez sa pureté ; <br />Et de son tour heureux imitez la clarté. <br />Si le sens de vos vers tarde à se faire entendre, <br />Mon esprit aussitôt commence à se détendre ; <br />Et, de vos vains discours prompt à se détacher, <br />Ne suit point un auteur qu’il faut toujours chercher. <br /><br />Il est certains esprits dont les sombres pensées <br />Sont d’un nuage épais toujours embarrassées ; <br />Le jour de la raison ne le saurait percer. <br />Avant donc que d’écrire, apprenez à penser. <br />Selon que notre idée est plus ou moins obscure, <br />L’expression la suit, ou moins nette, ou plus pure. <br />Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, <br />Et les mots pour le dire arrivent aisément. <br /><br />Surtout, qu’en vos écrits la langue révérée <br />Dans vos plus grands excès vous soit toujours sacrée. <br />En vain vous me frappez d’un son mélodieux, <br />Si le terme est impropre ou le tour vicieux : <br />Mon esprit n’admet point un pompeux barbarisme, <br />Ni d’un vers ampoulé l’orgueilleux solécisme. <br />Sans la langue, en un mot, l’auteur le plus divin <br />Est toujours, quoi qu’il fasse, un méchant écrivain.

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