Dans ce cabriolet de place j'examine <br />L'homme qui me conduit, qui n'est plus que machine <br />Hideux, à barbe épaisse, à longs cheveux collés : <br />Vice et vin et sommeil chargent ses yeux soulés. <br />Comment l'homme peut-il ainsi tomber ? pensais-je, <br />Et je me reculais à l'autre coin du siège. <br />- Mais Toi, qui vois si bien le mal à son dehors, <br />La crapule poussée à l'abandon du corps, <br />Comment tiens-tu ton âme au dedans ? Souvent pleine <br />Et chargée, es-tu prompt à la mettre en haleine ? <br />Le matin, plus soigneux que l'homme d'à côté, <br />La laves-tu du songe épais ? et dégoûté, <br />Le soir, la laves-tu du jour gros de poussière ? <br />Ne la laisse-tu pas sans baptême et prière <br />S'engourdir et croupir, comme ce conducteur <br />Dont l'immonde sourcil ne sent pas sa moiteur ?
